Santé/Bien-être

Suis-je -vraiment- hyperactive ?

Après les enfants, l’hyperactivité n’épargne pas les adultes… Est-ce un réel trouble ou une construction de notre société ? Il y a 3 ou 4 ans, j’avais interviewé 2 psychiatres qui m’avaient donnée leur avis -différent- sur le sujet. L’article -ci-dessous- n’avait finalement pas été publié, mais la thématique reste d’actualité…

Qu’est-ce que l’hyperactivité ?

 Gabriel Wahl, psychiatre

L’hyperactivité repose sur le triptyque « inattention », « impulsivité » et « agitation ». Si l’agitation tend à disparaître avec l’âge, le trouble de l’attention et l’impulsivité peuvent se maintenir toute la vie. C’est pourquoi on parle aujourd’hui de TDAH ou Trouble du Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité.

Patrick Landman, psychanalyste et psychiatre

L’hyperactivité existe en tant que symptôme mais pas le TDAH ; on a regroupé ces 3 symptômes pour vendre un médicament – le méthilphénidate, molécule commercialisée sous le nom de Ritaline®- dont ils sont précisément la cible. Le TDAH s’inscrit dans un courant venu des USA où tout comportement un peu excessif est pathologisé : un gourmand aura un trouble du comportement alimentaire, un étourdi des troubles cognitifs mineurs…

A quoi serait due l’hyperactivité ?

GW

Les recherches en imagerie médicale montrent que, pour l’essentiel, l’hyperactivité est un trouble biologique cérébral, en lien probable avec un léger dysfonctionnement des neuromédiateurs. En cause ? La génétique, avoir un parent hyperactif multipliant par 5 le risque de l’être à son tour. Mais aussi une souffrance néonatalogique : naissance avant terme, petit poids de naissance…

 PL

Nombre de symptômes ponctuels peuvent perturber l’imagerie cérébrale et les anomalies constatées ne sont pas spécifiques à l’hyperactivité. En revanche, notre société mondialisée et interconnectée, qui requiert une instabilité -ou flexibilité !- intelligente (vigilance, performance, multi-tâches…), crée de l’hyperactivité. Nous sommes donc nombreux à nous y retrouver, d’autant que cela est plutôt valorisé.

Comment reconnaître un hyperactif ?

GW

Les symptômes sont variés : citons pêle-mêle l’activisme, l’impatience, la distractibilité, l’impulsivité, le manque d’organisation (et une aversion au délai !) et d’endurance dans le travail, la procrastination… Ce qui, au quotidien, peut provoquer des difficultés (brusqueries, oublis, fâcheries…), sources d’instabilité sentimentale et professionnelle. Le diagnostic de l’hyperactivité reposant sur la continuité des troubles de l’enfance à l’âge adulte.

PL 

Le diagnostic demeure très incertain et superficiel, réduit l’être humain à une somme de comportements non spécifiques à l’hyperactivité. Par ailleurs, en distinguant mal le « normal » du pathologique, il induit du surdiagnostic.

L’hyperactivité se traite-t-elle ?

GW

Si beaucoup d’adultes s’accommodent parfaitement de leur hyperactivité, qui a aussi bien des atouts (créativité, spontanéité, goût d’entreprendre, du risque…), on doit consulter lorsqu’elle est source de souffrance. Le diagnostic, qui permet de mettre un nom sur ses difficultés, est déjà un soulagement… Le traitement le plus efficace repose sur une molécule, le méthylphénidate. Controversé en France, il est prescrit dans le monde entier depuis plus de 50 ans et a fait la preuve de son efficacité et innocuité. Il peut apporter un immense soulagement lorsqu’aucune autre thérapie (psychothérapies…) n’a su le faire…

 PL

Je ne le conteste pas : certaines personnes, très instables et incapables de construire quoi que ce soit, ont une très forte hyperactivité qui justifie un traitement médicamenteux. Mais cette proportion est minime et ne mérite pas la publicité qui en est faite. Dans la majorité des cas, le traitement passe par une bonne hygiène de vie associée à une psychothérapie ou des techniques de relaxation ou de méditation (pleine conscience…).

Gabriel Wahl est auteur de Les adultes hyperactifs, éd. Odile Jacob

Patrick Landman est auteur de Tous hyperactifs ?, éd. Albin Michel

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